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Bonjour tout le monde ! Aujourd’hui, je vous emmène à Kyoto à l’atelier Jakkyu. On a rendez-vous avec Nakamura Yoshiyuki et Nakamura Kaoru, artisans de Kyo Koma (京こま).

Carte du Japon, Kyoto

Je les appellerai Nakamura Y-san ou Nakamura K-san pour faciliter la lecture après tout, nous sommes entre nous !

étale du magasin

Je vous explique. C’est un petit atelier sur la route de mon travail. Un jour, je me suis dit pourquoi ne pas s’arrêter pour voir ce que c’est.

Et oh mon Dieu que le hasard fait bien les choses !

Dès que je suis entrée, je me suis dit “Mais c’est trop bien ! Il faut que je comprenne comment on fait ça, JE VEUX TOUT SAVOIR !” Bref pour ceux qui me connaissent, vous connaissez la chanson. J’ai pris directement un rendez-vous pour une interview. Mais ce que je ne savais pas à ce moment-là et que j’ai su le lendemain en allant au Miyako Messe, où se trouve le musée d’artisanat et de design de Kyoto. C’est que le Kyo Koma (京こま) est l’un des 74 artisanats traditionnels et typique de Kyoto.

COÏNCIDENCE ? JE NE CROIS PAS !

Quelques fois, j’ai vraiment l’impression que tout s’aligne parfaitement. Mais revenons à l’essentiel !

Qu’est que le Kyo Koma (京こま) ?

On va jouer un peu. Je vous laisse quelques instants pour deviner ce que c’est ?

Toupies de Kyo-Koma de différentes formes

ET OUI ! Ce sont des artisans de TOUPIE !

Pour la petite histoire, Les toupies, c’est vieux, mais genre vraiment très vieux. La plus vieille a été retrouvée en Mésopotamie et elle a été fabriquée, il y a 5 000 ans ! Ça commence à dater ! En 2020, la plus vieille toupie retrouvée au Japon a été découverte et elle a été fabriquée, il y a environ 1400 ans. Elle non plus n’est pas toute jeune. Tout ça pour dire que la fabrication des toupies est un artisanat qui est très ancien et mondial.

Mais revenons à notre Kyo Koma (京こま). Si on regarde de plus près le “Kyo” (京) fait référence au “Kyo”(京) de Kyoto (京都) et Koma (こま) veut dire toupie en japonais. Alors je vous vois venir. Pourquoi préciser que c’est des toupies de Kyoto alors qu’il en a partout dans le monde ? Tout simplement, j’ai le chic de tomber sur des PÉPITES ! Les toupies issues de Kyo Koma (京こま) sont singulières, car contrairement aux toupies traditionnelles faites en bois partout dans le monde ,les Kyo Koma (京こま) sont faites en tissu !!! Oui oui oui oui, vous avez bien lu, en tissu ! Ce n’est pas génial ! Mais je vais laisser Nakamura K-san vous expliquer tout cela.

LA RENCONTRE

1/ Présentez-vous et votre artisanat.

Je m’appelle Nakamura Kaoru. Avec mon mari, Nakamura Yoshiyuki, nous sommes artisans de Kyo Koma (京こま). Nous tenons notre magasin et notre atelier “Jakkyu” à Kyoto non loin de la station Nijo et du château Nijo.

Nakamura Yoshiyuki et Nakamura Kaoru, artisan de Kyo-Koma.

C’est un artisanat de toupie. Oui, je fais des toupies et nous ne sommes pas les seuls à le faire dans le monde. Il y en a partout à travers le monde. Mais la particularité des Kyo Koma (京こま) c’est leur matériau. Contrairement aux autres artisanats de toupies qui utilisent du bois comme matériau de base. Nous, on utilise du tissu. Et ça, nous sommes les seuls à le faire.

2/ Depuis quand faites-vous ce métier ?

Pour ma part, je le fais depuis que je me suis mariée. Mais pour mon mari, c’est différent. Il est la troisième génération de sa famille à faire ce métier. Cela a commencé avec sa grand-mère.

3/ Comment avez-vous découvert cet artisanat ? Qu’est qui vous a intéressé dans ce métier ?

Comme dit précédemment, je suis tombée dedans grâce à mon mari. En me mariant, je me suis tout simplement lancée dans l’aventure.

4/ Comment faire une toupie de Kyo Koma (京こま) ? Quelles sont les différentes étapes ?

Pour une toupie standard, il faut :

1-

Il faut faire la tige de la toupie. Pour cela, on prend simplement une tige de bambou. On la coupe à la bonne dimension. Puis on taille l’un des bouts pour lui permettre de bien tourner.

2-

Ensuite, on va faire le “corps” de la toupie. Mais bien sûr, il faut d’abord choisir les couleurs et ranger les bandes de tissu dans le bon ordre pour ne pas perdre de temps lors de la conception.

3-

Et c’est parti pour la réalisation. Il faut prendre le bout de la première bande, y mettre un peu de colle et la poser autour de la tige de bambou. Pour éviter les surprises, avant de continuer, il faut maintenir la bande autour de la tige pendant 10 secondes. Seulement, après cela, on peut continuer à enrouler la bande en essayant de la maintenir serrée. Lorsqu’on arrive au bout de la bande, on y met de la colle et pareil qu’au début, on la doit maintenir 10 secondes pour fixer la bande.

4-

Et c’est parti pour la réalisation. Il faut prendre le bout de la première bande, y mettre un peu de colle et la poser autour de la tige de bambou. Pour éviter les surprises, avant de continuer, il faut maintenir la bande autour de la tige pendant 10 secondes. Seulement, après cela, on peut continuer à enrouler la bande en essayant de la maintenir serrée. Lorsqu’on arrive au bout de la bande, on y met de la colle et pareil qu’au début, on la doit maintenir 10 secondes pour fixer la bande.

5-

Puis on répète l’opération pour les autres bandes. Mais attention ! Il ne faut pas positionner la nouvelle bande n’importe comment. Il faut impérativement la positionner dans le prolongement de la précédente. Cela évite d’avoir des différences d’épaisseur et de conserver la régularité et une continuité de la forme de la toupie.

6-

Une fois, toutes les bandes mises, on peut s’amuser à modifier la forme. Il suffit de décaler délicatement les bandes vers le haut ou vers le bas avec ses doigts. Mais ici aussi, il faut faire attention. Il faut le faire de manière uniforme sinon cela va déséquilibrer la toupie et donc elle ne pourra pas bien tourner.

7-

Une fois qu’on s’est décidé sur une forme. On peut passer à la dernière étape. Mettre le vernis qui va permettre de fixer la forme et de protéger la toupie.

5/ Combien de temps cela prend pour faire une toupie Kyo Koma (京こま) ?

Pour une toupie de standard, cela prend entre 20 et 30 minutes en comptant le séchage du vernis. Mais cela peut être beaucoup plus. Cela dépend de la taille et de la complexité de la forme de la toupie. Pour les plus complexes, cela peut prendre plusieurs jours.

6/ Quels sont les matériaux que vous utilisez ?

Comme je l’ai dit plus tôt, c’est notre particularité, nous utilisons du tissu, du coton plus précisément. Mais il nous arrive pour certaines occasions d’utiliser du tissu de kimono.

7/ Est que c’est du tissu spécialement fabriqué pour les Kyo Koma (京こま) ou est ce que c’est de la récupération d’une partie du tissu non-utilisable pour l’industrie du textile ?

Les bandes que l’on a, sont spécialement fabriquées pour les Kyo Koma (京こま). Si vous regardez bien, les bandes ne sont pas tissées. Les différents fils de coton sont positionnés les uns à côté des autres et collés entre eux. Cela donne un matériau de base un peu plus rigide que le coton tissé. Grâce à cela, il est plus facile de fabriquer des Kyo Koma (京こま).

Pour ce qui est de récupérer du tissu, j’y ai déjà pensé. Et oui, je pense que cela pourrait être très intéressant d’utiliser des chutes de l’industrie du textile. C’est important de penser à ça de nos jours et de produire de manière éco-responsable. On pourrait faire des collaborations et avoir l’occasion d’utiliser des textiles spéciaux. Je pense par exemple au Jeans. Mais si on le fait, je pense qu’il est important d’ajouter une étape supplémentaire dans la fabrication pour adapter au mieux ce tissu à la confection des Kyo Koma (京こま).

8/ Comment vous les procurer ?

Nous les achetons.

9/ Qu’est ce que vous préférez faire dans votre métier ?

Ce que je préfère, c’est d’avoir une nouvelle idée et de pouvoir la réaliser, la voir se concrétiser dans la réalité.

10/ Quel est le style de vos toupies ?

Nous faisons plusieurs sortes de toupies. Bien sûr, il y a le jouet pour les enfants. Mais nous faisons également des toupies qui se rapprochent plus de la sculpture ou de l’objet décoratif. Car il faut savoir qu’au Japon, la toupie porte une valeur symbolique très forte. C’est un porte-bonheur. Que ce soit pour le domaine privé ou le domaine professionnel, lorsqu’on l’utilise et qu’elle ne tombe pas, cela signifie que “les affaires tournent” et synonyme d’un bon présage.

11/ En quelles occasions achetez-vous ou offrez-vous des toupies en cadeau ?

Comme dit précédemment, vous pouvez en offrir aux enfants comme jouet. Mais il est coutume d’en offrir pour les occasions spéciales comme une naissance, un mariage, le lancement d’une entreprise dans le but de leur porter chance ou encore comme souvenir.

12/ Y a-t-il des codes ou règles à respecter pour qu’une toupie soit considérée comme du Kyo Koma (京こま) ? Si oui, est-ce que vous les suivez rigoureusement ?

Mis à part les étapes de la fabrication qui sont le fait d’enrôler un matériau autre que du bois autour d’un axe, je ne vois pas vraiment de règles. Il n’y a pas de couleurs ou de formes imposées. La seule limite que je vois, c’est notre propre créativité et imagination.

13/ Diriez-vous que le style des Kyo Koma (京こま) fabriquées aujourd’hui a changé par rapport à celles faites dans le passé ?

Oui, sans aucun doute. Le fait qu’il n’y ait pas vraiment de règle a clairement favorisé son évolution. Du temps de la grand-mère de mon mari, elle ne faisait que des toupies standards. Elle appliquait la forme des toupies traditionnellement faites en bois sur ces toupies en tissu. Maintenant, c’est différent. Nous faisons des toupies avec une grande variété de formes. Il y a des toupies fruits, des toupies animaux, des toupies à thèmes d’animés, nous faisons même des boîtes ou encore des sculptures composées.

Boite utilisant la même technique
Toupie sur le thème des Fruits
Toupie sculpture chat

14/ Diriez-vous que le Kyo Koma (京こま) peut encore évoluer ? Si oui, comment ?

Oui, je pense qu’il peut encore évoluer en continuant à chercher de nouvelles formes. Je pense également qu’en s’ouvrant aux collaborations avec d’autres artisans ou encore des designers du domaine du textile, comme on m’a mentionné plutôt, peut-être un bon moyen de faire évoluer le Kyo Koma (京こま).

15/ Pensez vous que cette technique puisse être utilisée pour faire d’autres objets ?

Oui, c’est clairement possible et j’y ai même déjà un peu réfléchi. Le fait de penser à d’autres objets, cela pourrait être un autre bon moyen de faire évoluer le Kyo Koma (京こま).

16/ Si vous aviez une baguette magique, que feriez-vous pour faire connaître votre artisanat ?

Je pense que je ferais en sorte de faire connaître mon travail au maximum auprès des enfants et des adolescents. De leur faire comprendre la signification de ce que cela représente. Et surtout de leur faire faire. Car je pense qu’en faisant des workshop et des démonstrations, on attise la curiosité. Cela permet d’inculquer plus facilement des valeurs à des enfants. Puis elles grandissent avec eux et ces même enfants une fois adultes les transmettent à leurs propres enfants. Cela garantit une certaine prospérité.

17/ Avez-vous quelque chose que voudriez dire ou ajouter ?

Enfants, adultes, personnes âgées, hommes et femmes, tout le monde peut faire des toupies Kyo Koma (京こま), alors venez jouer et vous amusez !

EXPÉRIENCE

Donc maintenant, j’en suis sûr ! Le hasard fait bien les choses ! Je remercie Nakamura Yoshiyuki et Nakamura Kaoru de m’avoir fait découvrir le KyoKoma (京こま) et leur univers.

Je trouve que cet artisanat est GÉNIAL ! Parce que par sa technique simple mais astucieuse (oui, il faut dire ce qui est.) ouvre tellement de possibilités d’évolution et de collaboration. On peut faire un transfert de technique vers un autre matériau. On peut chercher d’autres objets à faire.

Fabrication en cours d'une Kyo Koma grenouille.

Mais en plus de cela, pour l’avoir fait ! Car oui, je ne vous l’ai pas encore dit, mais à leur atelier, ils offrent la possibilité de faire votre propre toupie. Franchement, c’est une chouette expérience à faire. Je VALIDE ! Mais revenons à ce que je voulais dire. C’est une activité accessible et je me dis que ce ne serait pas compliqué de mettre en place des workshops dans des écoles ou encore dans des fablab. Je pense même que la technique peut être améliorée ou systématisée pour la rendre encore plus accessible.

Et la cerise sur le gâteau, c’est qu’on peut facilement ancrer son évolution dans une dynamique d’éco-conception en revalorisant les chutes d’autres industries.

Bon vous avez compris, j’ai énormément apprécié cette rencontre. J’ai été accueillie de façon royale et j’en suis parti avec des idées plein la tête. Je vous avoue que je suis à deux doigts de leur proposer une collaboration. Je ne sais pas du tout quel genre de collaboration cela peut-être, mais cela me titille de travailler avec eux.

La toupie que j'ai réalisé.

Et vous, ça vous a donné des idées ? Envie d’essayer ?

Ici vous pouvez retrouvez tous le travail de Nakamura Yoshiyuki et Nakamura Kaoru !

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Instagram Nakamura Yoshiyuki et Kaoru

Et vous, ça vous a donné des idées ? Envie d’essayer ?

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